«Le plus dur est à venir. On doit reconquérir le pouvoir qui nous a été volé en 2018 »

Une véritable démonstration de force pour les deux leaders de la plate-forme Lamuka, principale force politique de l’opposition. Le samedi 9 octobre, 2021, les militants de Lamuka ont répondu à l’invitation de leurs leaders au cours d’un meeting organisé à la place Sainte Thérèse, dans la commune de N’Djili, à Kinshasa. La veille, soit le vendredi 8 octobre, le discours de démobilisation du gouverneur de la ville de Kinshasa, qui a improvisé une rencontre populaire à la même place, n’a eu aucun effet.

C’est aux petites heures de la matinée que des groupuscules de militants arborant les drapeaux de la plateforme Lamuka, dont ceux de ces deux partis phares (Engagement pour la citoyenneté et le développement – Ecidé – et Nouvel élan), ont commencé à se masser aux endroits de rassemblement pour prendre la direction du lieu du meeting.

C’est à partir de 7 heures du matin que les premiers mouvements de la population arrivaient sur place, avec les différentes représentations politiques de Lamuka, se distinguant par les drapeaux de leurs partis respectifs et banderoles, frappées à l’effigie de leurs leaders.

Sous un soleil de plomb, la foule attendait avec impatience l’arrivée de leurs leaders, Martin Fayulu et Adolphe Muzito. C’est vers 16 heures que les deux « résistants » de Lamuka ont atteint le lieu de rassemblement.

D’entrée de jeu, Martin Fayulu et Adolphe Muzito ont fixé l’opinion sur plusieurs sujets qui alimentent la chronique. La confusion autour de la Céni, l’état de siège décrété en Ituri et dans le Nord-Kivu, la taxe RAM… ont fait l’essentiel de leur discours.

Alors que la confusion s’installe autour de la Céni, alimentant le doute sur la tenue des élections de 2023, Martin Fayulu a mis en garde : «Il  faut qu’on avance. Cette loi qui a été votée au parlement pour la nouvelle commission électorale est mauvaise, nous n’allons pas accepter d’une Céni politisée, mobilisez-vous pour qu’ils arrêtent de déléguer des hommes politiques pour des postes à la Céni. Nous prévenons aussi que nous n’allons accepter aucun report des élections de 2023, pas question de glissement. Enfin, nous disons NON à la fraude, il ne faudrait pas qu’on nous vole encore notre victoire. Pour réformer la loi sur la Céni, il faudrait juste trouver un consensus, il y a encore du temps».

De l’avis de Martin Fayulu, Corneille Nangaa, président sortant de la Céni, appartient au passé. Fayulu note que Corneille Nangaa ne doit en aucun cas toucher à un seul document de la Céni.

« Lui et son bureau doivent être chassés. L’administration actuelle de la Céni, comme les princes de l’Eglise de l’ECC et de la Cenco l’ont dit, elle peut faire le travail pour qu’il n’y ait pas de retard. Qu’ils fassent l’inventaire et qu’ils s’apprêtent techniquement. Sinon, Corneille Nangaa devrait déjà être en prison », pense-t-il.

Martin Fayulu et Adolphe Muzito ont, par ailleurs, fustigé l’échec de l’état de siège décrété dans les provinces du Nord–Kivu et de l’Ituri. Ils ont appelé au retour à l’administration civile.

Pour faire valoir ses idées, l’opposant, qui se présente jusqu’alors comme «le président élu», mise sur la pression de la rue en multipliant des manifestations populaires. Il projette déjà une marche le 16 octobre dont l’itinéraire reste à déterminer.

Appel à une nouvelle marche

Le meeting de Lamuka de ce samedi 9 octobre étant intervenu après le report de sa marche pacifique qui était prévue le 29 septembre dernier, cette coalition, qui sera animée par Martin Fayulu pendant les six prochains mois, a annoncé la tenue d’une autre marche pacifique le samedi 16 octobre prochain.

D’après certains cadres de cette coalition, il sera question pour Fayulu et Muzito d’exiger la dépolitisation de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et les réformes électorales consensuelles.

Muzito passe le flambeau à Fayulu

Selon un communiqué signé par les deux leaders en mois de février dernier selon lequel la coordination de la plate-forme Lamuka sera désormais assurée de manière alternative par les deux leaders de la plateforme, Martin Fayulu va coordonner Lamuka pendant les six prochains mois, soit d’octobre 2021 à avril 2022.

C’est dans ce cadre que les deux personnalités, Adolphe Muzito et Martin Fayulu, se sont livrés à la cérémonie de remise et reprise au poste de la coordination du présidium de leur coalition. Adolphe Muzito, fin mandat (avril-octobre 2021), a passé le flambeau à son collègue de l’Ecidé, Martin Fayulu, qui va coordonner le présidium pour les six prochains mois.

Avec l’adhésion du MLC de Jean-Pierre Bemba et l’Ensemble pour la République de Moïse Katumbi à l’Union sacrée de la nation, le tandem Muzito – Fayulumonte en puissance, accroissant chaque qui passe sa capacité de mobilisation. Drainer une foule comme celle qui s’est déplacé samedi à la place Sainte Thérèse prouve à suffisance que Muzito-Fayulu se positionne désormais en véritable contre-poids du pouvoir de Félix Tshisekedi.

Selon un proche collaborateur du président de l’Ecidé, la rencontre de samedi 9 octobre n’est qu’une partie remise.  «Le plus dur est à venir. On doit reconquérir le pouvoir qui nous a été volé en 2018 », note-t-il. Et de promettre : «Lamuka va multiplier des actions sur le terrain pour faire mal et dévoiler les faiblesses du régime en place».

Tighana Masiala