Procès «100 jours» : cet arrêt de la Cour de cassation qui redonne de l’espoir aux «Kamerhistes »

Nouveau rebondissement dans l’affaire ju-diciaire qui met en cause Vital Kamerhe, leader de l’Union pour la nation congolaise (UNC) et ancien directeur de cabinet du Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi. La Cour de cassation a décidé de casser l’arrêt rendu en appel par la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe confirmant la condamnation à 13 ans de travaux forcés du leader de l’UNC. Avec cette décision, ses partisans y voient déjà l’ombre d’un acquittement. Pour y arriver, il faudra passer par une rude bataille judiciaire.

Contre toute attente, la Cour de cassation, siégeant lundi à Kinshasa, a décidé d’annuler l’arrêt rendu au deuxième degré par la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe, condamnant Vital Kamerhe à 13 ans d’emprisonnement et travaux forcés.

Par conséquent, les juges de la Cour de cassation ont renvoyé la cause pour être rejugée à la Cour d’appel du même ressotr, mais avec une nouvelle composition des juges.

Dans son arrêt, la Cour de cassation note que la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe « a violé l’article 104 du Code de procédure pénale, en examinant le dossier alors qu’il n’était pas en état ». La Cour de cassation estime également qu’au second degré, « la juridiction d’appel a statué sur la base d’une notification de date d’audience alors qu’elle aurait dû citer le prévenu, ce qui constitue aussi une violation du droit de La défense prévue par l’article 19 de la Constitution ».

Ainsi, l’affaire portant sur la débâcle d’un volet du programme, dit de 100 jours, dans laquelle Kamerhe est poursuivi aux côtés du Libanais Jammal et de son neveu, Daniel Shangalume, a été renvoyée devant la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe, autrement composée, pour la rejuger dans son fond. C’est le retour à la case départ.

Sa défense se félicite d’une « victoire d’étape importante » qui ouvre la voie à un probable acquittement de Vital Kamerhe.

En attendant, c’est devant une nouvelle chambre d’appel que les avocats de Kamerhe doivent se battre pour casser le jugement rendu au premier degré par le Tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe (TGI/Gombe).

Les arguments de droit

«Dans ce cas, c’est la première condamnation de 20 ans qui demeurent entre temps, sauf si la Cour d’appel venait soit à l’acquitter, soit à réduire encore sa peine », indique un praticien du droit.

Me Willy Wenga, avocat au barreau de Kinshasa/Gombe, lui emboîte le pas. « Avec l’arrêt de la Haute Cour qui vient d’annuler la condamnation de 13 ans de travaux forcés, le président Kamerhe retourne sous le coup de condamnation de 20 ans de travaux forcés prononcée au 1er degré par le TGI/Gombe, mais dont l’exécution reste suspendue du fait de son appel à réexaminer. De nouveau devant le juge de fond en appel mais en état de liberté provisoire, il reste dans cette position jusqu’à l’arrêt définitif, sauf si condamné de nouveau, son arrestation immédiate est ordonnée », note-t-il.

Quant à l’acquittement de Kamerhe, Me Wenga pense que tout dépend de la perspicacité de ses avocats : «La défense, qui doit cette fois-ci être musclée, devra s’organiser pour ne pas perdre cette occasion en or. La bonne foi aussi des uns et des autres sera de nouveau mise à l’épreuve pour offrir au peuple, un procès juste et équitable qui tient compte de la sauvegarde du droit de la défense ».

Plus direct, un autre spécialiste du droit note, avec un brin d’ironie, qu’avec cette décision de la Cour de cassation, « on va tout droit à l’acquittement pur et simple de l’homme sérieux et correct qui a encore un rôle à jouer pour l’émergence de cette République ».

D’un ton pondéré, un juriste de profession pense que « sur le plan strictement de Droit, ceci est une bonne décision. Le Tribunal de Grande instance de Kinshasa/Gombe avait produit un monstre judiciaire. Comment un juge pénal pouvait ordonner la confiscation des biens d’une personne qui n’a pas été poursuivie ni condamnée ? L’accusation n’avait pas été en mesure de prouver la culpabilité de Kamerhe au-delà du doute raisonnable ». Avant de relativiser : « Mais l’acquittement de Kamerhe ne pourrait signifier que ce Monsieur n’avait pas détourné l’argent public dans les faits ».

Plus critique, l’ONG ACAJ de Me Georges Kapiamba pense que «l’arrêt de la Cour de cassation est un frein à la lutte contre la corruption».

Kamerhe acquitté ? L’hypothèse fait du chemin

Le leader de l’UNC, toujours en convalescence en France, vient de gagner une première bataille. Il lui reste maintenant la seconde – la plus cruciale d’ailleurs – c’est-à-dire démonter pièces contre pièces toutes les irrégularités contenues dans le jugement rendu au premier degré par le TGI/Gombe.

C’est le nouvel duel judiciaire face aux avocats de la République qui l’attendent à la chambre recomposée de la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe.

En attendant, Vital Kamerhe et tous ses complices restent toujours sous le coup d’une condamnation du TGI/Gombe.

Procès à la fois judiciaire et politique, c’est probablement sur le deuxième terrain que pourrait se dénouer l’affaire Kamerhe. On apprend qu’entre ses partisans et ceux du Chef de l’Etat qu’il a d’ailleurs aidé à la victoire présidentielle de décembre 2018, le pont n’a jamais rompu.

N’est-ce pas que le Président Félix Tshisekedi a toujours prédit que Kamerhe aura tôt ou tard un «grand rôle » à jouer dans ce pays. Serait-ce le moment ? Difficile à prédire.

Econews