Revisitassion des contrats chinois, pression de l’Occident… : Félix Tshisekedi, le funambule

Le Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo

Pas facile d’être à la place de Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, Président de la République Démocratique du Congo, en cette période de grande bataille idéologique entre le bloc occidental et le BRICS, ce regroupement composé du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud qui cherche à s’affranchir de l’hégémonie occidentale. Pays aux immenses ressources naturelles, la RDC est au cœur de toutes les convoitises. La bataille est rude entre les deux camps. Tout se joue bien loin de Kinshasa, extrêmement préoccupé par le regain des tensions dans sa partie Est. Pour se défaire de la pieuvre de l’Est, Kinshasa multiplie des alliances qui ne sont toujours pas acceptées dans un camp comme dans l’autre. Président de la RDC, Félix Tshisekedi est confronté à une équation à multiples inconnues. Comment nouer des alliances avec la Russie ou la Chine sans froisser ses partenaires traditionnels de l’Occident. C’est le grand dilemme. Un exercice d’équilibriste que Tshisekedi s’emploie tant bien que mal à manœuvrer. En vrai funambule.
Depuis la publication du rapport sulfureux de l’IGF (Inspection générale des finances) sur les contrats signés en 2008 entre la RDC et un Groupement d’entreprises chinoises, tous les regards étaient rivés vers le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo. Alors que la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe annonce déjà l’instruction de ce dossier qui vise toutes les personnes et entreprises qui ont un lien avec ces contrats, le Président de la République a créé la surprise vendredi en Conseil des ministres en promettant la révisitation de la « Convention de collaboration d’avril 2008 entre la République Démocratique du Congo et le Groupement d’Entreprises Chinoises ».
«Faisant suite aux conclusions de la mission d’évaluation de l’Inspection Générale des Finances (IGF) sur l’exécution de la Convention de collaboration signée le 22 avril 2008 entre la République Démocratique du Congo et le Groupement d’Entreprises Chinoises constitué par CHINA RAILWAYS CORPORATION et SINOHYDRO, le Président de la République a rappelé que celles-ci font état, entre autres, de cas de non-respect des dispositions des contrats, de l’inexécution des engagements contractuels et de subjectivité de certains actes posés par les parties », pouvait-on lire dans le compte-rendu du Conseil des ministres.
Dans sa communication, le Président de la République a souligné «le caractère inquiétant de cette situation déplorable tant, d’une part, pour le développement du secteur minier qui constitue à ce jour, la locomotive qui tire la croissance économique de notre pays, du fait de la diversité des minerais exploités qui répondent à une forte demande mondiale, mais dont les valorisations commerciales lors des exportations n’intègrent pas une grande valeur ajoutée; et d’autre part, par la lenteur du dynamisme que devrait normalement connaître le programme de construction des infrastructures dont notre pays a grandement besoin pour l’éclosion de son potentiel tant humain qu’économique».
Face à cet état de choses, le Président de la République a évoqué «l’impérieuse nécessité d’une revisitation de cette convention dans le sens d’un rééquilibrage des avantages visant à garantir les intérêts de la République Démocratique du Congo dans l’exploitation de la SICOMINES S.A.».
Il a, par conséquent, demandé non pas au Gouvernement, mais plutôt à son Cabinet de «réunir toutes les parties prenantes afin de préparer les éléments qui seront versés dans les discussions avec les partenaires chinois lors des travaux de la Commission mixte qui auront lieu très prochainement ».
Que le Chef de l’Etat responsabilise son Cabinet, en lieu et place du Gouvernement, dans les prochaines discussions que la RDC se propose d’engager avec la Chine, c’est la preuve évidente de toute la complexité du schéma annoncé par le Président de la République. Le sujet est d’une sensibilité telle que Kinshasa doit bien manœuvrer pour ne pas se tirer une balle dans les pieds.

Qu’est-ce à dire ?
Dans la guerre d’agression qui l’oppose au Rwanda via les terroristes, Kinshasa s’oppose depuis toujours à la résistance du bloc occidental à s’allier à sa cause. Malgré toutes les preuves, recueillies par des experts de l’ONU, la communauté internationale hésite. Son attachement au président rwandais Paul Kagame est un secret de polichinelle. Ce qui commence sérieusement à agacer la République Démocratique du Congo qui lorgne déjà vers d’autres partenaires, particulièrement la Russie de Poutine et la Chine de Xiping.
Vu de l’Occident, la présence de la Russie ou de la Chine aux côtés de la RDC passerait pour un crime de lèse-majesté. Une situation que l’Occident n’est pas loin d’accepter. Or, Kinshasa veut se battre pour reconquérir sa souveraineté, remise en cause, dans sa partie orientale par le Rwanda. Pour se battre, la RDC doit se doter d’armes et s’entourer des alliés qui portent véritablement sa cause. Ce que l’Occident ne peut pas lui offrir.
Que lui reste-t-il à faire ? Sinon, explorer d’autres horizons qui mènent aussi vers la Chine que la Russie. C’est la difficile équation que tente de résoudre Félix Tshisekedi, désormais au centre d’une rude bataille entre l’Occident et le bloc progressiste sino-russe.
Si l’Occident lui fait pression de ne pas tomber sous le charme de la Russie ou de la Chine, Félix Tshisekedi a rendez-vous avec son peuple qui le pousse à mettre toute en œuvre pour ramener la paix dans l’Est de la RDC. Ce que l’Occident ne peut pas lui garantir, dans le contexte actuel. Ce qui n’est pas pour la Chine ou la Russie. Ce dernier bloc n’attend que l’appel de Kinshasa pour venir à son secours.
Dans la ville haute, des indiscrétions rapportent que des discussions sont très avancées entre Kinshasa et Pékin pour l’acquisition d’un lot important d’armements chinois. A ce titre, rapportent les mêmes sources, une délégation militaire de haut rang se trouve présentement à Kinshasa pour boucler cet accord.
Curieusement, c’est au moment que la RDC et la Chine s’apprêtent à mettre la dernière main sur un accord de coopération militaire que le Président Tshisekedi a choisi de revisiter les contrats chinois de 2008.
Il y a une bonne raison qui explique cette démarche du Chef de l’Etat. Que nous réserve-t-il ? Jusqu’où ira Félix Tshisekedi ? Autant de questions qui alimentent la chronique.
Dans tous les cas, tout porte à croire que derrière sa volonté de revisiter les contrats chinois, il y a encore et toujours cette main noire occidentale. On se rappelle que, depuis la signature de cette convention de collaboration en 2008 sous Joseph Kabila, l’Occident n’a jamais digéré la mainmise de la Chine sur les juteuses ressources minières de la RDC. Ce qui avait d’ailleurs amené le Fonds monétaire international (FMI), bras financier de l’Occident, à poser son véto, obligeant Kinshasa à renégocier cet accord pour la ramener de 9,2 milliards de dollars américains à 6,2 milliards. Depuis lors, les contrats chinois ont été aperçus depuis l’Occident comme un affront.
Le rapport de l’IGF sur ces contrats n’est pas non désintéressé. Ça fait d’un plan, dont les ramifications remontent bien au-delà des frontières de la RDC. Tout est fait pour démonter l’empire chinois dans les mines congolaises. Ce qui pose un vrai dilemme pour Félix Tshisekedi : révisiter les contrats chinois pour plaire à l’Occident. Qu’adviendra-t-il alors de Pékin qui se dit prêt à aider Kinshasa à se défaire de M23 ? Suspense !

Econews

La Chine propose ses avions de combat à Kinshasa

Une délégation de l’entreprise aéronautique chinoise Catic, accompagnée d’officiers de l’Armée populaire de Libération (APL), séjourne à Kinshasa pour proposer des avions de combat à la République démocratique du Congo, a rapporté jeudi l’Agence de presse associée (APA).

L’objectif de ce déplacement à Kinshasa est de proposer à la présidence congolaise l’acquisition de plusieurs avions de combat multirôles Chengdu FC-1 Xialong, un appareil construit par CATIC (China Aviation Technology Import-Export Corp) et fruit d’un partenariat industriel sino-pakistanais. Il est aussi construit au Pakistan par l’entreprise Pakistan Aeronautical Complex (PAC), sous l’appellation de JF-17 Thunder.

Cette offre vise à répondre au souhait du président congolais Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo de renforcer la force aérienne congolaise, l’une des composantes des Forces armées de la RDC (FARDC), qui n’est actuellement dotée que de quelques Sukhoï Su-25 de conception soviétique. L’un d’entre eux a été touché fin janvier alors qu’il s’apprêtait à se poser sur l’aérodrome de Goma (est) par un tir de missile que la RDC a imputé au Rwanda voisin, accusé de soutenir la rébellion du M23 (Mouvement du 23 Mars).

La délégation chinoise a également proposé à Kinshasa des avions Chengdu J-10 – de la firme Chengdu Aircraft Corporation -, qui sont «nettement plus onéreux», a précisé l’APA (indépendante), reçue à Bruxelles.

Les FARDC ont déjà commandé neuf drones de combat et de reconnaissance Male («Medium Altitude Long Endurance») de type CH-4 à l’entreprise China Aerospace Science and Technology Corporation (CASC), a rappelé l’agence.

La RDC est confrontée à la rébellion du M23, qui s’est emparée depuis 2022 de vastes pans de territoire de la province du Nord-Kivu, région riche en minerais. Ce groupe armé majoritairement tutsi, vaincu en 2013 par les FARDC avec l’appui des Casques bleus de la Monusco, a repris les armes fin 2021.

Avec Rtbf.be