Standard & Poor’s maintient la note de la France à «AA », Le Maire salue «un signal positif »

Après le coup de semonce de Flitch, l’agence américaine Standard and Poor’s a rendu son verdict sur la note de la France, vendredi dernier. Et c’est un soulagement pour l’Hexagone qui voit sa notation être maintenue à « AA », invoquant une amélioration prévue de la situation budgétaire comme le plaidait le gouvernement d’Emmanuel Macron. Bruno Le Maire, ministre français de l’Economie, salue « un signal positif » qui rassure les uns et les autres.
La décision de l’agence de notation américaine était très attendue par le gouvernement français, soucieux d’afficher politique économique solide et sérieux budgétaire.
Après la mauvaise note de Fitch infligée en avril, c’est un soulagement, au moins temporaire, pour le gouvernement : l’agence S&P Global (anciennement Standard and Poor’s), l’une des plus influentes, a maintenu la note de la France, vendredi 2 juin, la gardant au niveau «AA ». « Cela est principalement dû à la révision de la stratégie de consolidation budgétaire du gouvernement», écrit l’agence de notation, en citant comme faits positifs, outre la réforme des retraites, la fin programmée des aides énergétiques à la faveur de la baisse des prix des hydrocarbures.
Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a salué «un signal positif ». «Notre stratégie en matière de finances publiques est claire. Elle est ambitieuse. Et elle est crédible », a-t-il déclaré au JDD. Il a d’ailleurs déclaré qu’il annoncerait, le 19 juin, les premiers milliards d’euros d’économies pour le budget 2024. Il avait d’ores et déjà annoncé la fin des subventions du gaz («bouclier tarifaire»), dont les cours ont chuté, à la fin de l’année.
L’agence de notation, un des trois principales avec Fitch et Moody’s, a cependant maintenu sa perspective «négative», laissant planer le spectre d’une future baisse en cas de dérapage. S&P prévient des «risques» relatifs à l’exécution des objectifs budgétaires gouvernementaux : «Ils incluent l’absence de majorité absolue au Parlement français depuis la mi-2022, qui pourrait compliquer la mise en œuvre des politiques, ainsi que des incertitudes au sein des économies mondiales et européennes, et des conditions de financement plus tendues». A l’avenir, l’agence souligne que «la fragmentation politique ajoute de l’incertitude sur la capacité du gouvernement à mettre en place des politiques favorables à la croissance économique et au rééquilibrage budgétaire».

« Discussions très étroites »
L’échéance était prise très au sérieux par un gouvernement, soucieux d’afficher politique économique solide et sérieux budgétaire. Interrogée dimanche, la première ministre, Elisabeth Borne, avait affirmé sur Radio J que le ministre de discussions très étroites» avec l’agence «sur tout ce qu’on fait pour maîtriser nos finances publiques  l’économie avait eu des». Le gouvernement sera «intraitable» sur la réduction des déficits, avait martelé mercredi Bruno Le Maire sur France Inter, jugeant «convaincants» ses «bons arguments» développés devant S&P, tout en reconnaissant «très franchement » ignorer quel serait le verdict de cette agence.
La dégradation de la note peut avoir pour effet d’augmenter les intérêts d’emprunt français auprès des investisseurs, ces derniers réclamant davantage pour consentir à prêter à la France. Or, les taux d’intérêt des emprunts à dix ans sont déjà à des hauts niveaux depuis onze mois en raison des hausses de taux de la Banque centrale européenne, qui bataille contre une l’inflation et fait mécaniquement remonter les taux d’emprunts des Etats de la zone euro.
S&P note la France depuis 1975 et n’a dégradé son appréciation qu’à deux reprises. Ce fut aussi la première à avoir retiré à l’Hexagone son emblématique «triple A » en 2011, meilleure note possible et symbole d’une excellente gestion, dont un petit cercle bénéficie encore auprès des trois agences, à l’instar de l’Allemagne, des Pays-Bas et de l’Australie.

Mieux notée qu’elle ne le mériterait
A la fin d’avril, Fitch a mis en avant «l’impasse politique» du gouvernement pour justifier sa dégradation de «AA » à « AA-» – un commentaire qui avait suscité l’ire d’Emmanuel Macron. De son côté, Moody’s a évoqué le «faible mandat» dont dispose le gouvernement dans un commentaire qui n’a toutefois pas donné lieu à une dégradation de la note. L’agence de notation européenne Scope Ratings, moins regardée que ses consœurs mais qui a abaissé sa perspective pour la France de «stable» à «négative» le 26 mai, a invoqué «l’absence de majorité au Parlement », de nature à compliquer la trajectoire de réduction du déficit et de la dette.
A l’épreuve des chiffres pourtant, la France paraît mieux notée qu’elle ne le mériterait, avait analysé Fitch. Elle détient l’endettement le plus élevé des pays dans la catégorie « AA », et présente le double de l’endettement médian dans cette catégorie. S&P relève que la dette publique restera au-dessus de 110 % du PIB dans la période 2023-2026, « avec un déficit budgétaire persistant, bien qu’en baisse». La dette était à 111,6 % du PIB en 2022, et le gouvernement vise 108 % en 2027.
Après avoir atteint 4,7 % en 2022, le déficit public français devrait quant à lui légèrement remonter cette année à 4,9 % avant de refluer progressivement à partir de 2024, anticipe le gouvernement dans son programme de stabilité publié ces dernières semaines, qui table sur un retour dans les clous budgétaires européens, soit sous les 3 %, en 2027.
S&P ne semble toutefois pas y croire puisque même si elle ne donne pas de prévisions pour 2027, elle table sur un déficit de 3,8 % en 2026, après 4,6 % entre 2023 et 2025 (contre 4,9 % dans sa précédente estimation).
Sur la croissance, elle table sur une augmentation annuelle de 1,2 % en moyenne entre 2023 et 2026, contre 1,5 % prévu par le gouvernement.
Avec Le Monde