Baisse des recettes et explosion des dépenses : Kinshasa implore à Washington la «flexibilité» du FMI

La délégation congolaise après des échanges avec le directeur Afrique du FMI

En séjour à Washington (Etats-Unis) où il conduit la délégation congolaise aux assemblées annuelles du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, a imploré, au cours d’une réunion avec le directeur du département Afrique du FMI, sa clémence face au laxisme dont le Gouvernement congolais fait preuve en matière des dépenses. Par son ministre des Finances, «le gouvernement congolais a pris le ferme engagement à apporter le maximum de transparence et d’efficience dans la qualité de la dépense publique», rapporte, depuis Washington, la cellule de communication du cabinet du ministre des Finances.
Si l’année 2022 a été celle de tous les records dans la mobilisation des recettes, le Gouvernement a entamé l’année 2023 avec une mauvaise note, spécialement marquée par un net essoufflement du rythme de mobilisation des recettes, accompagnée d’une forte expansion des dépenses publiques.
En programme avec le Fonds monétaire international (FMI), à Kinshasa, des inquiétudes gagnent déjà les esprits. On craint que le cadre macroéconomique, relativement stable, ne cède sous la pression des dépenses contraignantes de l’Etat dont les rémunérations des agents et fonctionnaires de l’Etat ainsi le financement du processus électoral.
En séjour à Washington, dans le cadre des assemblée annuelles de Printemps des institutions de Bretton Woods (FMI et Banque mondiale), le ministre des Finances, Nicolas Kazadi Kadima-Nzuji, accompagné du ministre d’Etat en charge du Budget, Aimé Boji Sangara, et de Mme la gouverneure de la Banque Centrale du Congo (BCC), Malangu Kabedi-Mbuyi, se sont entretenus, le lundi 10 avril 2023, avec le directeur Afrique du FMI, M. Abebe Aemro Selassie.
Selon la cellule de communication du cabinet du ministre des Finances, cette réunion s’est focalisée sur la situation macroéconomique qui a prévalu en 2022 et les perspectives de 2023. Concernant les défis, le ministre des Finances a rappelé que la RDC connaissait déjà un choc dû aux défis sécuritaires et à la fragilité structurelle de l’économie congolaise. Le gouvernement congolais a pris le ferme engagement à apporter le maximum de transparence et d’efficience dans la qualité de la dépense publique.
L’argentier national est bien conscient que, depuis le début de cette année, la RDC affiche de mauvais résultats aussi bien en termes de mobilisation des recettes que des dépenses.
Aussi, a-t-il demandé au FMI d’être flexible, tout en accompagnant les efforts en cours pour que les performances exceptionnelles de croissance économique et d’accumulation des réserves contribuent à la stabilité du taux de change et à la préservation de grands équilibres.
Prenant la mesure de l’urgence de remettre de l’ordre dans la mise en œuvre des engagements convenus avec le FMLI dans le cadre de l’accord triennal signé en juillet 2021, le gouvernement congolais a pris « le ferme engagement à apporter le maximum de transparence et d’efficience dans la qualité de la dépense publique ».

Des finances publiques pas trop reluisantes
S’agissant de la situation des finances publiques, il y a lieu de rappeler lesrecettes mobilisées, du 1er au 31 mars 2023, étaient de l’ordre de 1.217,4 milliards CDF sur les prévisions de 1.384,1 milliards CDF, portant ainsi le taux d’exécution à 88%, a fait part, vendredi dernier en Conseil des ministres, le ministre Nicolas Kazadi.
En termes des recettes, la situation cumulée au premier trimestre 2023 présentait un montant total des recettes de 3.340 milliards CDF sur les prévisions cumulées de 3.556 milliards CDF pour un taux de réalisation de 93,9%. Comparées aux recettes réalisées au premier trimestre 2022 qui étaient de 3.323 milliards CDF, il se dégage une petite augmentation de 16,8 milliards CDF.
Pour améliorer le niveau des recettes, le ministre des Finances a dit s’appuyer sur les conclusions de différents dossiers des contentieux en cours dans les régies financières ainsi que sur les retombées des missions mixtes de contrôle de la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations (DGRAD) dans les secteurs des mines et de l’environnement.
En ce qui concerne les dépenses publiques, pour le seul mois de mars 2023, elles se sont chiffrées à 1.381 milliards CDF dont 46%, soit 631 milliards CDF ont été affectées aux rémunérations. Ceci est dû au paiement, au cours de ce mois, du solde des rémunérations du mois de février 2023 et une bonne partie du mois de mars. Pour ce dernier, près de 250 milliards des salaires ont été reportés pour être payés en avril 2023. Au courant du mois de mars, 30 millions USD ont été mis à la disposition de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), au titre d’acompte à sa première dotation de l’année 2023. Les dépenses exceptionnelles sécuritaires, quant à elles, représentaient en cumul annuel plus de 623 milliards CDF.
On se rappelle qu’au terme de la conclusion de la 3ème revue du programme conclu avec le FMI,Mme Mercedes Vera Martin, cheffe de la mission du FMI en RDC, avait reconnu, en février dernier, que «les efforts de mobilisation des recettes et la maîtrise des dépenses courantes, en renforçant la chaîne des dépenses et en mettant en place des garanties adéquates, restent essentiels pour créer un espace budgétaire pour faire face à la situation sécuritaire», estimant que «plus généralement, les réformes de la gestion des finances publiques, y compris la mise en place du compte unique du Trésor et le renforcement du système de passation de marchés publics et de gestion des investissements publics, contribueront à améliorer le processus budgétaire et sa crédibilité, à renforcer la gouvernance budgétaire et à améliorer la capacité d’absorption et l’efficacité des dépenses ».
Autant d’engagement que Kinshasa peine à mettre en œuvre pour assainir ses finances publiques.

F.K.