Devant le monde réuni à l’ONU, Félix Tshisekedi tire à balles réelles sur le Rwanda

President of the Democratic Republic of the Congo Felix Tshisekedi addresses the 77th Session of the United Nations General Assembly at U.N. Headquarters in New York City, U.S., September 20, 2022. REUTERS/Eduardo Munoz

Haut lieu de la diplomatie mondiale, le siège des Nations Unies, à New York (Etats-Unis), a vécu une journée de mardi 20 septembre très tendue. C’est loin du champ des opérations de la partie Est de la République Démocratique du Congo que le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, est allé dénoncer la main noire du Rwanda, un voisin à la fois encombrant et extrêmement nuisible, dans la déstabilisation de la partie Est de son pays.
Le mardi 20 septembre, Félix Tshisekedi avait décidé de tout déballer – sans langue de bois ni circonlocutions. Devant la tribune des Nations Unies, le Président de la République a nommément cité le Rwanda comme élément déstabilisateur pour une paix durable aussi bien dans la partie Est de la RDC que sur l’ensemble de la région des Grands Lacs. Une situation qui dure depuis 20 ans.
Dans son discours, Félix Tshisekedi a rappelé tous les efforts entrepris depuis janvier 2019 pour ramener le Rwanda à la raison. Que de concessions n’a-t-il pas fait ? Quels accords n’a-t-il pas signé ? Pour qu’à la fin, le Rwanda nargue non seulement toute la République, mais aussi la communauté internationale qui en a cru en sa bonne foi.
Lorsqu’il s’est agi de dénoncer l’élan belliqueux du Rwanda, Félix Tshisekedi n’a pas porté des gants : « En dépit de ma bonne volonté et de la main tendue du peuple congolais pour la paix, certains de nos voisins n’ont trouvé mieux que de nous remercier par l’agression et le soutien à des groupes armés terroristes qui ravagent l’Est de la RDC. C’est le cas actuellement du Rwanda qui, au mépris du droit international, de la Charte de l’ONU et de l’Acte constitutif de l’Union Africaine, a, une fois de plus, non seulement agressé, en mars dernier, la RDC par des incursions directes de ses forces armées, les RDF, mais aussi occupe des localités de la province du Nord-Kivu par un groupe armé terroriste interposé, le Mouvement du 23 mars dit M23, auquel il apporte un soutien massif tant en matériels de guerre qu’en hommes de troupes ».
Et dire que c’est le même Rwanda qui tourne toute la communauté internationale en bourrique en s’inscrivant dans les schémas de paix qu’il ne sait pas respecter.
Là aussi, Félix Tshisekedi a remis une couche : « Et, comme pour défier la communauté internationale, le M23 avec le soutien de l’armée rwandaise a même abattu un hélicoptère de la MONUSCO et tué 8 casques bleus, commettant ainsi un crime de guerre. Je dénonce, en ce lieu emblématique de la vie internationale, avec la dernière énergie cette énième agression dont mon pays est victime de la part de son voisin, le Rwanda, sous couvert d’un groupe terroriste, dénommé M23 ».

S’affranchir des dogmes
Compte tenu des évidences, le Président Tshisekedi est d’avis que «l’implication du Rwanda et sa responsabilité dans la tragédie que vivent mon pays et mes compatriotes des zones occupées par l’armée rwandaise et ses alliés du M23 ne sont plus discutables dès lors que plus d’une fois aussi bien les groupes d’experts dument mandatés par l’ONU et le mécanisme conjoint de vérification élargi de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs, CIRGL, que des organisations non gouvernementales humanitaires et des droits de l’Homme crédibles les ont établies dans des rapports documentés et objectifs, à la limite du scientifique ».
La flagrance de Kigali étant plus que jamais établie, Félix Tshisekedi a invité la communauté internationale, en premier lieu les Nations Unies, à s’affranchir de ses dogmes qui l’empêchent de voir la réalité en face.
«Pour éclairer la communauté des nations et mettre fin aux sempiternelles dénégations des autorités rwandaises à ce sujet, le Gouvernement congolais réitère sa demande au Président du Conseil de sécurité de distribuer officiellement aux membres du Conseil le dernier rapport des experts de l’ONU sur la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC et de le faire examiner avec diligence par lui afin d’en tirer toutes les conséquences qui s’imposent sur le plan du droit de la paix et de la sécurité internationale. Il y va de l’image et de la crédibilité de notre Organisation. Procéder autrement serait, d’une part, encourager le Rwanda à poursuivre son agression, ses crimes de guerre et ses crimes contre l’humanité en RDC et, d’autre part, nourrir davantage la suspicion légitime des Congolais sur l’impartialité de l’ONU ainsi que la complicité de certains de ses membres dans ces crimes », a lancé Félix Tshisekedi.
Pour que nul ne l’ignore, le Chef de l’Etat a fait observer que rechercher la paix par la voie du dialogue n’est pas une faiblesse. Bien au contraire.
Aussi, a-t-il réaffirmé «haut et fort à cette tribune de la plus haute instance internationale de gestion des affaires du monde la détermination du peuple congolais et de ses dirigeants de défendre toujours jusqu’au sacrifice suprême l’intégrité territoriale, l’indépendance et la souveraineté de leur pays, dans le respect bien sûr du droit international et des engagements pris au sein des organisations internationales dont il est membre ».
A tout prendre, note-t-il, «le peuple congolais demande aux Nations Unies, à l’Union Africaine, aux Communautés régionales africaines et aux partenaires de la RDC de ne plus se fier aux dénégations éhontées des autorités rwandaises et de contribuer plutôt au rétablissement de la sécurité, à la construction d’une paix durable et à la création de conditions nécessaires à une coopération fructueuse dans la région des Grands Lacs pour le bien de tous ».

Tighana Masiala