Kinshasa sous la menace d’une nouvelle pénurie de carburant à la pompe

La ville de Kinshasa est sous la menace d’une nouvelle pénurie de carburant à la pompe. Dans les stations-service de la ville, le gasoil se fait déjà rare, seul l’essence-super reste encore disponible. Mais, pour combien de temps ? Si le Gouvernement dit continuer à honorer tous ses engagements en palliant le manque à gagner en faveur des prix du carburant, les pétroliers distributeurs réclament, à leur tour, le paiement de leurs arriérés, soit près de 12 millions de dollars américains.
A Kinshasa, les stations-service commencent déjà à sécher. A ce jour, le gasoil ou mazout se fait déjà rare, occasionnant de longues files dans les stations-service. Seul l’essence-super est encore disponible pour des véhicules légers.
Au Gouvernement, on ne s’en émeut pas. Le ministère des Hydrocarbures, gestionnaire de ce secteur, brille par un silence macabre. Mais, dans les rangs des pétroliers distributeurs, la grogne gagne du terrain. Comme toujours, ils accusent le Gouvernement ne pas jouer franc jeu, en gelant le paiement du manque à gagner que l’Etat congolais est censé suppléer dans les prix du carburant à la pompe.
Sur les antennes de la radio Top Congo Fm, Emery Mbatshi, président de l’association des pétroliers indépendants du Congo, a lancé dernièrement l’alerte en ces termes : «Ça fait maintenant deux ans, jour pour jour, que les pétroliers privés, les nationaux, n’ont jamais reçu un paiement. Ils ont peut-être pris des engagements avec certains fournisseurs. Comment vont-ils honorer leurs engagements? ».
Selon lui, la pénurie est imminente : «La fermeture est envisagée parce qu’ils ne vont pas vendre du vent» – toutes les démarches auprès des autorités n’ayant jamais abouti. A ce propos, Emery Mbatchi précise : «Nous avons tenu plusieurs réunions avec nos collègues et nous n’avons jamais demandé aux gens de fermer. Ça ne se fera pas. Mais ceux qui ferment, ce qu’ils n’ont rien. Ils ne vont pas vendre du vent ni de l’eau, mais ils vendent des produits pétroliers, hautement stratégique».
La panique gagne déjà le secteur : « Je viens de signer un courrier dans lequel nous interpellons le Premier ministre. Pourquoi le ministre des Finances ne nous paie pas? Et comment on va s’approvisionner ? ».
12 millions USD réclamés au Gouvernement
Qu’est-ce que les pétroliers réclament finalement au Gouvernement. Le président de leur association révèle : «Tout mis en ensemble, nous sommes autour de 12 millions. Et nous devons rester comme ça comme des enfants, des orphelins où nous n’avons même pas quelqu’un pour nous soutenir, pour nous appuyer ? ».
Il s’est dit indigné de l’indifférence du Gouvernement : «Nous participons à cette politique du Gouvernement pour fluidifier les produits dans les stations-service. Mais, comment pouvons-nous être négligés ainsi? » Il prévient une grande pénurie : «Ceux qui ont encore du stock en cours, ils vont continuer à vendre, mais ceux qui n’en ont pas, leurs station seront fermées».
Mais sur le terrain, les files d’attente sont déjà visibles, spécialement pour le gasoil qui se fait de plus en plus rare.
En octobre dernier, le ministère des Finances avait annoncé avoir mis en place un processus rigoureux de certification de pertes et de manque à gagner des sociétés pétrolières pour assainir ce secteur et améliorer la transparence.
Nicolas Kazadi avait notamment précisé que des économies d’ordre de 57,6 millions USD ont été réalisées au profit du trésor public sur ce dossier.
Le 20 février 2023 devant la presse, réuni au traditionnel briefing qu’organise le porte-parole du Gouvernement, le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, avait indiqué, tout en reconnaissant des arriérés de 2022, que plus de 400 millions $US ont été alloués aux pétroliers en termes de compensation aux prix de compensation à la pompe. Ce sont ces arriérés, non payés à ce jour, qui sont à la base d’une menace de pénurie des carburants dans la ville de Kinshasa. Les jours à venir seront agités.

Hugo Tamusa