L’envoyé britannique éconduit à la Présidence : coup de froid entre Kinshasa et Londres

Londres ne digère pas le pied de grue que Kinshasa a infligé à son ministre d’État chargé du développement et de l’Afrique, Andrew Mitchell, qui vient de séjourner à Kinshasa, du 18 au 21 mars. Alors que la Présidence de la République et l’ambassade britannique en RDC ont déjà tout covenu, l’envoyé spécial de Londres n’a pas été reçu par le Président de la République, Félix Tshisekedi, avant de quitter Kinshasa le 22 mars 2023. Au Palais de la Nation, on parle d’un agenda chargé du Chef de l’Etat qui n’aurait pas rendu possible un tel entretien. A Londres, c’est tout le contraire. Une situation qui envenimé davantage les relations entre Kinshasa et Londres, au moment où, dans la capitale congolaise, on dénonce la main noire britannique derrière les actions belliqueuses du Rwanda en RDC.
Entre Kinshasa et Londres, les relations sont tendues après le refus du Président Félix Tshisekedi d’accorder une audience à l’envoyé du gouvernement britannique Andrew Mitchell, son ministre chargé de l’Afrique qui a séjourné dans la capitale congolaise du 18 au 21 mars 2023. La version officielle congolaise fait état de l’agenda chargé du chef de l’Etat, et qui aurait empêché ce dernier à recevoir le plénipotentiaire anglais.
Selon Jeune Afrique, dans le programme officiel partagé par l’ambassade britannique en RDC, tout était pourtant clair : Andrew Mitchell devait rencontrer le Président Félix Tshisekedi, et le ministre des Affaires étrangères, Christophe Lutundula, pour discuter du renforcement du partenariat entre le Royaume-Uni et la RDC.
Arrivé à Kinshasa dans la soirée du 18 mars et durant son séjour de trois jours, le ministre britannique n’aura finalement été reçu que par le chef de la diplomatie congolaise. Les portes du Palais de la nation lui ont été hermétiquement fermées.
«La Présidence congolaise a fait attendre Andrew Mitchell toute la journée du 20 mars, jusqu’à minuit », a confirmé à Jeune Afrique une source britannique proche du dossier, avant de quitter Kinshasa le 22 mars 2023.

Les non-dits
La véritable raison, estiment les observateurs, résulterait de la frilosité du gouvernement britannique à condamner sans équivoque « l’agression rwandaise » et l’appui avéré du régime de Paul Kagamé à la rébellion du M23 qui déstabilise l’Est de la République Démocratique du Congo, occupant avec l’aide de l’armée rwandaise des localités des territoires de Rutshuru, Masisi et Nyiragongo au Nord-Kivu.
Londres en effet, contrairement à plusieurs capitales occidentales, à l’unisson avec le Conseil de sécurité des Nations Unies qui ont condamné et continuent à faire pression sur Kigali pour l’inciter à cesser son appui à la rébellion du M23, est resté dans une position évasive, sans doute pour ne pas compromettre ses relations avec ce petit pays d’Afrique orientale pour des raisons évidentes. Parmi celles-ci, l’accord conclu avec le pouvoir rwandais consistant à transférer sur son territoire la dizaine de milliers de migrants illégaux qui auraient réussi à atteindre les côtes britanniques après une traversée périlleuse se la Manche. En contrepartie, Londres s’est engagé à apporter au Rwanda une assistance financière de près de 150 millions USD de dollars.Sans omettre le fait que le Rwanda fait désormais partie du Commonwealth.
A travers une Note verbale adressée au ministère congolais des Affaires étrangères, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a adressé une vive protestation, en dépit de ses échanges avec le chef de la diplomatie congolaise, le vice-Premier ministre en charge des Affaires étrangères, Christophe Lutundula Pen’Apala.
Pourtant, le président de la République avait déjà haussé le ton peu avant la tournée africaine du ministre Mitchell. Dans une interview accordée au quotidien anglais The Times, Félix Tshisekedi avait clairement indexé les Britanniques parmi les rares Occidentaux à ne pas avoir condamné explicitement le soutien rwandais au M23.
Il apparaît de plus en plus que le Chef de l’Etat congolais et une grande frange de ses compatriotes ne sont plus d’accord avec les partenaires complaisants vis-à-vis du Rwanda qui, en dépit de tous les abus commis par l’armée rwandaise dans l’Est de la RDC, ferment les yeux.
L’accord de rapatriement des réfugiés, signé entre Londres et Kigali, a jeté le froid entre ces deux capitales. Si bien qu’à Kinshasa, on ne se fait plus de doute sur le soutien indéfectible de Londres à Kigali. Dans ces conditions, Félix Tshisekedi n’a donc pas jugé utile de rencontrer l’envoyé spécial de Londres à Kinshasa. Une pullule amère que Londres a du mal à digérer.

Econews