Kinshasa – Kigali : une rupture est annoncée

Entre Kinshasa et Kigali, la belle amitié affichée aux premières années de Félix Tshisekedi s’est émoussée. Les deux capitales se détestent et n’entretiennent plus de bons rapports. La résurgence des rebelles du M23 a donc attisé le feu, poussant Kinshasa à se montrer un peu méfiant vis-à-vis de Kigali. Certes, la rupture n’est pas encore consacrée. Mais, chaque jour qui passe le président rwandais Paul Kagame s’éloigne de plus en plus de son homologue congolais Félix Tshisekedi. A Kinshasa, on ne se fait plus d’illusion, conjuguant déjà Paul Kagame au passé. Récemment, à l’ouverture à Kinshasa de la conférence diplomatique, Félix Tshisekedi, s’est adressé malignement à Paul Kagame : « Il est irréaliste et improductif, voire suicidaire pour un pays de notre Sous-Région de penser qu’il tirerait toujours des dividendes en entretenant des conflits ou des tensions avec ses voisins ». Un message directement destiné à Kigali. Entre Kinshasa et Kigali, une rupture est en téléchargement.

Entre les président Félix Tshisekedi de la République Démocratique du Congo et son «frère» Paul Kagame du Rwanda se sont découvert ses actes de traîtrise qui les ont poussés au bord de la rupture. Depuis, même sur les apparences, les embrassades d’alors n’ont plus de place. Les deux hommes posent des gestes qui ne couvrent plus leurs distanciations.

D’abord, le refus de Kagame de rencontrer Tshisekedi avec qui, il ne loupait aucune occasion de se mettre en vedette pour démontrer à la face du monde que tout allait bien. D’ailleurs, pour sceller ce grand amour, un contrat fut signé entre les deux «frères» de la région des Grands Lacs pour une coopération mutuellement avantageuse. L’un accorde à l’autre le droit de raffiner l’or qui sort des entrailles du sol de l’autre. Des photos ont été prises au grand bonheur des partisans et soutiens de l’un et de l’autre.                Il n’y avait plus des diables ni des démons d’un côté et des anges de l’autre. On avait à faire à deux voisins qui se portent et qui ont décidé de marcher la main dans la main pour construire la paix et développer leurs pays respectifs.

Mais, au fil des jours, la situation ne semble plus être la même. Des signes avant-coureurs se sont pointés avec l’absence de Paul Kagame à une réunion à Oyo autour du doyen Denis Sassou Nguesso. Cette absence, non élucidée par des canaux officiels, avait mis la puce à l’oreille de nombreux observateurs. «Ce n’était pas un hasard », avait ironisé un diplomate de la sous-région.

M23 : la main noire de Kigali

Quelques jours avant, aussi curieux que cela puisse paraître, des rebelles du M23, cantonnés au Rwanda après avoir été défaits par les FARDC, ont opéré des incursions meurtrières sur des positions de l’armée congolaise. « Ces attaques qui ont causé des dizaines des morts dans les rangs des FARDC ne peuvent être ignorées par Kigali. Soit, elles sont voulues par le président Kagame ou elles sont permises et soutenues », a analysé le diplomate africain de la sous-région des Grands lacs.

Du côté des FARDC, on ne comprend pas que ces éléments puissent disposer du matériel ultrasophistiqué qui leur a permis d’opérer à distance et dans l’obscurité, soupçonnant un appui de la part d’une armée d’un pays voisin. Tous les regards sont tournés vers le Rwanda, bien entendu comme étant ce soutien à cette rébellion que Kigali a soutenu dans le passé.

Dans une adresse aux diplomates congolais, réunis récemment à Kinshasa dans le cadre de la conférence diplomatique, le Président Tshisekedi a déclaré que le pays qui se complaît dans la déstabilisation des autres indéfiniment ne gagnera rien au final. Une allusion claire au voisin rwandais.

Sur un ton menaçant – sans bien sûr cité Kigali – Félix Tshisekedi n’a pas fait dans la dentelle en déclarant : «Il est irréaliste et improductif, voire suicidaire pour un pays de notre sous-région de penser qu’il tirerait toujours des dividendes en entretenant des conflits ou des tensions avec ses voisins ».

Son silence n’est pas un signe de faiblesse, a-t-il laissé entendre. « En ce qui concerne notre pays, je m’emploie, sans naïveté ni faiblesse et avec beaucoup de lucidité, depuis mon arrivée à la tête de cette République, à restaurer la confiance dans les relations avec nos voisins ainsi qu’à développer une coopération multisectorielle bénéfique à nos peuples respectifs par la conclusion des accords bilatéraux et multilatéraux, la réalisation des projets d’intérêt commun et les concertations régulières entre nos gouvernements », a rappelé Félix Tshisekedi. Avant de tendre la main aux pays qui sont bien disposés à établir des rapports sincères et honnêtes avec la RDC : «Je suis profondément convaincu qu’il est un devoir sacré de chaque État de notre sous-région d’éviter tout acte générateur de tensions et de conflits avec les autres ou, à tout le moins, d’en minimiser le risque ».

Pour le moment, entre Kinshasa et Kigali, c’est «je t’aime, moi non plus ».

Econews