Retombées de l’occupation de Bunagana : la population condamnée à l’érrance

Un millier de ménages avaient fui Bunagana depuis la résurgence du M23 et les affrontements ultérieurs les opposant aux Forces armées de la république démocratique du Congo au début du mois de juillet. Devant la violence des combats qui ont débouché sur la prise de cette localité par les rebelles soutenus par l’armée rwandaise, des familles se sont réfugiées en Ouganda, tandis qu’une autre partie se dirigeait vers le Rwanda. Le revirement des autorités ougandaises s’explique difficilement, tant que l’UPDF est en opérations conjointes avec les FARDC sur le territoire congolais.
Depuis le 1er septembre, l’armée et la police ougandaises s’emploient aux expulsions systématiques des familles de réfugiés congolais établies à l’Ouest de l’Ouganda après le déclenchement des hostilités dans le territoire de Rutshuru (Nord-Kivu). La société civile dans la région rapporte que 400 familles sont arrivées à Rutshuru-Centre le 2 septembre, tandis que 350 autres seraient localisées dans le groupement Busanza.
Les réfugiés rentrent en RDC par le petit poste frontalier de Kitagoma, préférant contourner Bunagana dans le groupement Jomba et la zone occupée par le M23 soutenu par l’armée rwandaise.
Les familles refoulées étaient arrivées dans la localité de Kisoro, en Ouganda, où certaines d’entre elles ont pris des maisons en location, tandis que d’autres, les moins nanties, s’étaient érigés des abris de fortune aux alentours de la même localité.
Les forces ougandaises ont mis les réfugiés devant une alternative : soit ils embarquaient à bord des bus afin d’être acheminés au camp des réfugiés de Nyakabande à 17 kilomètres de la frontière congolaise, soit ils regagnaient leur pays. Leurs abris détruits et incendiés, ils n’avaient d’autre solution que de regagner le pays natal.
La réticence des réfugiés à rejoindre le camp des réfugiés de Nyakabande résulte de la rumeur persistance selon laquelle les rebelles du M23 procéderaient aux recrutements forcés de jeunes enfants dans les camps des réfugiés établis le long de la zone frontalière entre l’Ouganda et la république démocratique du Congo.
Une première réaction est venue du chef de groupement Jomba. Jackson Gachuki a lancé un appel au gouvernement congolais afin qu’il s’implique dans la protection et l’assistance aux déplacés refoulés d’Ouganda.

Des réfugiés et déplacés internes délaissés
La RDC compte, à ce jour, environ deux millions de réfugiés disséminés dans les pays voisins, répartis entre le Rwanda, l’Ouganda, la Tanzanie, l’Angola et la Zambie, auxquels s’ajoutent plus de 500 mille déplacés internes. Ces derniers sont concentrés à Bunia et ses alentours. Ils proviennent du territoire de Djugu principalement et de la région d’Oicha, chef-lieu du territoire de Beni.
Un autre groupe d’un millier de familles, fuyant les tueries des ADF sur l’axe Mongbalu-Mambasa, sont arrivés depuis plusieurs mois à Mangina (30 kilomètres de Beni). A ces groupes vulnérables s’ajoutent les déplacés de Goma, victimes de l’éruption du volcan de Nyiragongo de février 2020.
Tous ces sinistrés ne bénéficient d’aucune assistance des pouvoirs publics et survivent tant que mal grâce aux interventions de quelques ONG internationales, elles-mêmes débordées par l’afflux quotidien de déplacés sur les sites d’hébergement.
Plusieurs missions dites d’évaluation du gouvernement ou de l’Assemblée nationale ont été dépêchées en Ituri et au Nord-Kivu dans les camps des déplacés internes sans qu’elles soient suivies d’une action caritative visible et conséquente. Les visites officielles, fortement médiatisées, ne débouchant pas sur une assistance gouvernementale conséquente. Les déplacés et autres réfugiés comptent parmi les oubliés de la République.

MMF