Chute de l’euro face au dollar : qui sont les gagnants et les perdants ?

L’euro vient d’atteindre la parité avec le dollar. Pourquoi cette chute de la monnaie européenne ? Et quelles sont les conséquences ? Voici des éléments de réponses.

Combien vaut un euro en dollar ?
L’euro a perdu 15 % de sa valeur par rapport au dollar en un an. De quoi renchérir les produits importés pour les consommateurs. Mais aussi donner un coup de pouce aux industries exportatrices.
La valeur de l’euro dégringole depuis un an face au dollar. Avec 1 €, on pouvait obtenir 1,19 dollar il y a un an. Aujourd’hui, avec 1 €, on n’a plus qu’1 dollar. Mercredi 13 juillet 2022, l’euro est même passé, brièvement, sous le seuil symbolique d’un dollar, retrouvant son niveau de 2002, l’année de sa mise en circulation.
Pour comprendre, il faut entrer dans la mécanique des monnaies. Elles varient entre elles notamment sous l’effet des mouvements de capitaux. «Actuellement, on assiste à des transferts de l’Europe vers les États-Unis», observe Patrick Artus, conseiller économique de Natixis. Des investisseurs (assurances, fonds de pension etc.) vendent de l’euro pour acheter du dollar, ce qui fait baisser la monnaie européenne et monter la devise américaine.
Les capitaux vont là où les «obligations» (dettes d’État), notamment, rapportent le plus. Un titre de dette des États-Unis à dix ans offre aujourd’hui un intérêt moyen de 3 %, deux fois celui espéré en France. Et l’écart devrait se creuser. Cela s’explique par un niveau d’intervention différent des banques centrales, de part et d’autre de l’Atlantique. Pour freiner la consommation et l’inflation, elles augmentent les taux d’intérêt qu’elles contrôlent. «Mais les marchés financiers anticipent une hausse des taux moins importante de la part de la Banque centrale européenne que de la Réserve fédérale américaine », note Patrick Artus. Ce mouvement en direction des titres américains est accentué par la guerre en Ukraine. « La menace de coupure du gaz russe fait planer un risque sur la croissance en Europe ».

Qui sont les perdants de la chute de l’euro ?
D’abord, les consommateurs. Une grande partie des produits consommés en France est importée et souvent achetée en dollars, même en provenance de Chine. Comme l’euro perd de sa valeur, les produits sont plus chers dans les magasins européens. « C’est le cas de l’essence, des matières premières agricoles, des produits électroniques, des machines à laver…». La chute de l’euro contribue donc à l’inflation. «Sur les 8,6% d’inflation en Europe, environ deux points sont dus à la dépréciation de l’euro ». Les voyageurs européens, qui se rendent cet été aux États-Unis, verront eux aussi leur pouvoir d’achat amoindri.
Les industries exportatrices devraient aussi tirer leur épingle du jeu, l’aéronautique, par exemple. Les compagnies aériennes achètent leurs avions en dollars. Comme le pouvoir d’achat du billet vert s’apprécie, le prix des Airbus, reposant sur des coûts salariaux en euros, va baisser pour les clients. «C’est un avantage par rapport à Boeing», note Patrick Artus. «Cet avantage concerne globalement les secteurs très internationalisés: l’agroalimentaire, le luxe, la pharmacie etc.», complète Anne-Sophie Alsif, cheffe économiste au cabinet BDO. «Mais il peut être amoindri par la flambée des matières premières, accentuée par la hausse du dollar. Le secteur des transports, par exemple, risque d’en pâtir ».
Avec Ouest-France.fr