Le phénomène «bouchons» à Kinshasa : causes, effets et pistes de solutions (lu pour vous)

La situation des embouteillages à Kinshasa est préoccupante. En effet, lors de la 37ème réunion du Conseil des ministres tenue le 21 janvier 2022, le chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, était revenu sur ce problème sérieux en instruisant le gouverneur de la ville de Kinshasa et les responsables de la Police nationale congolaise de faire respecter le Code de bonne conduite aux éléments de la Police, le Code de la route aux usagers de la route, de procéder au désengorgement de toutes les artères de la ville, etc. Pour éradiquer les embouteillages ou « bouchons » qui impactent négativement les activités socio-économiques de Kinshasa, Frère Pie Nsukula Bavingidi, Frère visiteur provincial, représentant légal de l’Institut des Frères des Ecoles Chrétiennes, District du Congo-Kinshasa propose, en sa qualité de chercheur, des pistes de solutions dans son article publié dans la revue du Centre de Recherche Interdisciplinaire de l’Université pédagogique nationale (CRIDUPN) dont le titre est repris ci-dessous.
En menant une étude sur la situation d’embouteillages dans la ville de Kinshasa, l’auteur (Frère Pie Nsukula Bavingidi, Frère visiteur provincial, représentant légal de l’Institut des Frères des écoles chrétiennes, District du Congo-Kinshasa) a focalisé son attention sur les usagers de la route ci-après : chauffeurs, conducteurs de motos-taxis communément appelés «Wewa», éléments de la Police de circulation routière (PCR), élèves et étudiants, personnes adultes et autres usagers de la route (tireurs de chariot et vendeurs ambulants).
Abordant l’aspect causal des embouteillages, l’auteur note que les conducteurs de motos-taxis manquent de professionnalisme et constituent un risque pour les âmes qu’ils transportent. Il en est de même des tireurs de chariot dont le déploiement sur la chaussée est souvent indigeste et gêne la circulation.
Les éléments de la Police de circulation routière se livrent à des pratiques incommodes en devenant des «agents de désordre» au lieu d’être des « agents de l’ordre ».
Les vendeurs des produits maraîchers et autres écoulant leurs marchandises sur la chaussée. Leur présence rétrécit la voie routière et rend la circulation difficile.
Dans tout cela, les piétons paient le pot cassé suite aux difficultés de transport et nombreux d’entre eux traversent mal la chaussée. Au lieu d’utiliser les passerelles par exemple, ils préfèrent prendre le raccourci en escaladant les séparateurs. D’autres ne tiennent pas compte des passages cloutés pour traverser la chaussée, d’autres encore envahissent la chaussée lorsque le transport devient difficile jusqu’à se précipiter à monter à bord des véhicules, etc. Il y a aussi les comportements imprévisibles des étudiants, tels que la manifestation et les revendications politiques sur la voie publique, les «réquisitions» intempestives des véhicules des sociétés, les tapages routiers les jours des cérémonies de collation des grades académiques, les levées de deuil etc. Tout ceci rend la circulation difficile.
D’autres causes sont l’état d’impraticabilité des routes, le non-respect par les officiels et non-officiels des règles de courtoisie routière.
Les conséquences qui en résultent sont : l’augmentation du prix de la course, la fuite des tronçons et la pratique de «demi terrain» (pratique qui consiste à sectionner le parcours par les chauffeurs; le fait de vouloir coûte que coûte passer premier en se faufilant entre les véhicules expose les conducteurs de taxis-motos aux risques des accidents de la circulation. Débordés, tendus et stressés, les éléments de la Police de circulation routière s’éclipsent, laissant les usagers de la route se débrouiller seuls.
Les marchés de fortune créés le long des artères exposent les vendeurs à des accidents de la circulation.
Comme pistes de solution, Frère Pie Nsukula Bavingidi estime que, pour juguler le phénomène «bouchons» constaté fréquemment à Kinshasa, l’Etat est le seul habilité à rappeler les usagers de la route à l’ordre et à le maintenir.
Concernant les chauffeurs, des actions doivent être prises par l’Etat en vue de faciliter la circulation : le recyclage des chauffeurs, le contrôle permanent de leur santé visuelle et psychique ainsi que le contrôle technique rigoureux de leurs engins.
Quant à l’entrée dans la ville de Kinshasa des véhicules appelés « poids lourds », Frère Pie pense qu’elle doit être réglementée en exigeant par exemple de n’entrer à Kinshasa que la nuit pour éviter des engorgements.
Association regroupant tous les chauffeurs de la République Démocratique du Congo, l’ACCO a l’impérieux devoir de sensibiliser ses membres à avoir un comportement civique et moral digne de les honorer et leur métier.
Il est souhaitable que les conducteurs de motos-taxis suivent une formation dont la fin doit être sanctionnée par un document officiel. Ils doivent être identifiés ainsi que leurs motos et qu’on leur octroie une plaque d’immatriculation et un permis de conduire. Le respect du Code de la route et le port obligatoire de casque doivent être de rigueur.
Les éléments de la Police de circulation routière doivent être conscientisés régulièrement afin qu’ils changent de mentalités. L’Etat doit obliger les vendeurs à ne pas vendre sur la chaussée pour que celle-ci soit dégagée. Pour les piétons, la connaissance des règles rudimentaires du Code de la route doit être de mise.
S’agissant des routes, elles doivent être praticables pour permettre aux usagers de circuler aisément. Le respect scrupuleux de signaux routiers est parmi les remèdes efficaces pour pouvoir lutter contre les embouteillages. Il est aussi bon aux écoles et médias d’initier les enfants à la connaissance et au respect du Code de la route.
Aux ministères de l’Intérieur et des Transports, Frère Pie propose la réinstauration du train urbain comme il en existe dans beaucoup de grandes villes du monde.
Quoique leurs cortèges soient prioritaires, les officiels ne doivent pas user de leur droit officiel pour brûler les règles de bonne conduite.
Les autorités urbaines doivent s’engager à dégager les voies publiques envahies par des épaves des véhicules et les marchés pirates, à démolir les constructions anarchiques, etc. Elles doivent avoir une politique d’entretien des routes afin d’éviter les nids de-poule.
Enfin, il est bon que le gouvernement s’implique davantage dans les projets de réhabilitation des routes.

Véron Kongo